Joseph Carey Merrick, Denis Van P, éditions Sandawe, 74 pages, 16,95 euros.
John Merrick, plus connu sous son surnom d’Elephant Man. Lorsque l’on songe à cet Anglais difforme de la fin du XIXe siècle au destin tragique, on pense forcément au film qu’en a tiré David Lynch et à la performance de John Hurt dans le rôle titre. Désormais, peut-être que l’image du personnage dessiné par Denis Van P, avec ses grands yeux tristes s’imposera-t-il également. Venue de loin (la genèse du projet remonte à 2004) et mûrement réfléchie, cette première biographie en bande dessinée séduit par son humanité. Après un prologue pas forcément indispensable, mais un beau fondu enchaîné de transition entre l’Egypte ensoleillé et les bas fonds londoniens, le récit biographique suit un cours linéaire. Enfance malmenée, péripéties d’une vie de forain et d’exploitation, retour très difficile de Bruxelles à Londres et enfin, les retrouvailles avec le bon docteur, qui offrira à John Merrick quelques années d’apaisement avant une mort prématurée à moins de 30 ans.
Le contraste surprend au départ, entre le dessin semi-réaliste et les propos, pour le coup hyper-réalistes et durs. Mais le charme opère vite. Avec notamment ce fond noir et ses larges marges jouant la similitude avec les vieux films. Le récit de cette triste existence émouvra forcément, tout comme la bonté naïve du personnage, jamais aigri et émerveillé des choses de la vie.
« Long est le chemin qui mène de l’enfer à la lumière« , conclut Denis Van P dans le dossier qui complète les planches. C’est vrai pour le destin d’Elephant Man et aussi pour le temps qu’il a fallu pour permettre de faire naître cet album. Notamment grâce au financement participatif promu par la plateforme collaborative Sandawe (les 277 édinautes ayant contribué au financement de l’oeuvre à hauteur de 31 000 euros) son nommément remerciés en début de l’album). Dans les deux cas, l’enjeu valait le coup.